Dans le domaine en évolution rapide de la génétique, une nouvelle technique appelée « DIPA-CRISPR » apparaît comme une percée potentielle. Développée par une équipe de chercheurs de l’Université de Kyoto et de l’Institut de biologie évolutive d’Espagne, cette méthodologie a permis pour la première fois de modifier génétiquement un cafard.
Contrairement aux techniques conventionnelles qui nécessitent une injection directe dans les œufs, DIPA-CRISPR agit sur les insectes adultes, ouvrant ainsi de nouvelles possibilités en recherche biologique. Avec une efficacité prouvée jusqu'à 50%, cette innovation pourrait avoir de profondes implications non seulement pour la lutte antiparasitaire, mais aussi pour la compréhension des fonctions biologiques des insectes.
La révolution CRISPR : des cafards à tous les autres insectes
Dans le vaste monde des insectes, la blatte est souvent considérée comme gênante et indésirable. Pourtant, CRISPR a fait d’elle une véritable célébrité des laboratoires. Daimon Takaaki de l’Université de Kyoto et son équipe ont développé une technique révolutionnaire appelée « DIPA-CRISPR » qui pourrait changer notre façon de voir les insectes… Et je ne parle pas esthétiquement.
Jusqu'à présent, pour modifier génétiquement les insectes, les scientifiques devaient injecter CRISPR ou d'autres technologies directement dans les œufs à un stade précoce de développement. Ce n'est pas une mince affaire si l'on considère que certains œufs, comme ceux de la blatte, sont protégés par une coquille dure difficile à percer. Imaginez essayer de casser une noix avec une aiguille : pas exactement un morceau de gâteau.
Cette procédure nécessitait un équipement spécialisé et coûteux et un personnel hautement qualifié. Chaque espèce d'insecte nécessitait une configuration spécifique, et certaines ne pouvaient pas du tout être modifiées. Mais DIPA-CRISPR change les règles du jeu.
Comment fonctionne DIPA-CRISPR ?
Au lieu de cibler les œufs, le système CRISPR est injecté dans le corps des insectes adultes, à proximité de leurs embryons en développement. Dans l’étude qui vient de paraître (je mets le lien ici), le système a été testé pour produire des insectes aux yeux blancs, empêchant l’expression de certains gènes. Dans les résultats, jusqu'à 22% de cafards et plus de 50% de triboliums rouges de la farine ils ont hérité du trait désiré. Les mutations ont également été transmises à la progéniture des insectes génétiquement modifiés.
« D’une certaine manière, les chercheurs sur les insectes ont été libérés d’un fardeau » dit Daimon. « Nous pouvons désormais modifier les génomes des insectes plus librement et à volonté. En principe, cette méthode devrait fonctionner pour plus de 90% des espèces d'insectes."
Les défis et les limites
Comme toute nouvelle technologie, DIPA-CRISPR a aussi des choses à perfectionner. Certaines espèces, telles que les mouches des fruits, peuvent ne pas convenir à cette technique.
De plus, bien que DIPA-CRISPR puisse désactiver efficacement des gènes spécifiques (« knock-out »), il n’a pas été aussi efficace pour ajouter des gènes (« knock-in »). Les expériences « knock-in » avec le coléoptère rouge de la farine ont été efficaces de seulement 1,2 %.
Modification du gène des blattes : pourquoi c'est une découverte importante
DIPA-CRISPR est beaucoup plus simple que la méthode standard pour créer des insectes génétiquement modifiés. Il nécessite un équipement minimal et fonctionne avec des protéines Cas9 disponibles dans le commerce. Cela lui donne un avantage sur les autres technologies CRISPR utilisées pour éditer les insectes et les arachnides.
"Nous sommes peut-être au début d'une ère où nous pouvons exploiter pleinement les incroyables fonctions biologiques des insectes", dit-il. Daimon. « En principe, il est également possible que d’autres arthropodes soient génétiquement modifiés avec une approche similaire. Pas seulement la blatte, mais aussi des parasites agricoles et médicaux comme les acariens et les tiques, et même des pêcheries importantes comme les crevettes et les crabes.
La science a sa propre façon de transformer le commun en extraordinaire. DIPA-CRISPR ouvrira de nouvelles portes dans la recherche, la lutte antiparasitaire et la compréhension de la biologie.